Vieillesse et migration, entre enracinement et déracinement L’expérience solidaire de la Maison Biloba à Bruxelles
Selon les Nations-Unies, le terme “migrant” désigne un individu qui vit, de manière temporaire ou permanente, dans un pays où il n’est pas né et dans lequel il a établi des liens sociaux significatifs. Comment vieillit-on dans son pays d’accueil lorsque l’on est migrant ? Songe-t-on au retour vers son pays d’origine ou reste-t-on près de ses enfants et de son réseau social, construit année après année ? A l’âge de la retraite, certains décident de rejoindre leur terre natale et d’autres préfèrent vieillir là où ils ont construit leur vie sociale, professionnelle et familiale. La Belgique, confrontée depuis quelques années à cette question, doit réfléchir aux solutions innovantes à apporter, tout en tenant compte des spécificités de cette population migrante vieillissante.
Nous partons à la rencontre de la Maison Biloba et de ses -futurs- habitants, un lieu de vie solidaire et multiculturel pour les seniors de toutes origines, du très densément peuplé, quartier Brabant (du nom de la rue commerçante qui le traverse, entre Schaerbeek et SaintJosse-ten-Noode).
Contexte
La vieillesse est un processus biologique et universel mais aussi une construction sociale et culturelle. « Chaque société a sa propre définition du troisième âge et véhicule ses propres représentations de la vieillesse. De ce fait, les personnes âgées acquièrent une fonction, un rôle, un statut différent selon chaque culture. »
C’est ainsi que vieillir dans son pays d’accueil confronte les personnes âgées à des conceptions de la vieillesse différentes de celles qu’elles connaissent dans leur pays d’origine. Elles regrettent parfois l’âgisme et la mise à l’écart des seniors dans notre société occidentale contemporaine. Ou encore, ils aimeraient vieillir chez leurs enfants mais ce lien intergénérationnel se distend parfois. La famille élargie se transforme peu à peu en famille nucléaire. Cette évolution des structures familiales dans le pays d’accueil fragilisent l’entraide interfamiliale. Elle peut causer un dilemme chez les enfants pris en étau entre l’envie de s’occuper de leurs parents ou de demander à une aide extérieure. « Quand on vient d’un modèle culturel où il coule de source que la prise en charge est assurée par les enfants, cela peut créer un véritable dilemme dans une société qui ne réunit pas les conditions d’une solidarité entre génération. »
Les migrants, souvent ouvriers, ont travaillé dur et cela se répercute inévitablement sur leur santé. Ils recourent rarement aux aides extérieures, par méconnaissance des institutions mais aussi à cause de la barrière de la langue. Certains migrants âgés préfèrent se soigner en Belgique plutôt que dans leur pays d’origine où ils retournent vivre quelques mois par an. « Turcs et Marocains auraient tendance à éviter de se faire soigner dans leur propre pays, en raison, d’une part, de la qualité des soins qui serait jugée moins bonne, et d’autre part, du coût financier supérieur que ces soins occasionneraient. Certains suivent des traitements chroniques et sont attachés à leur praticien habituel en Belgique, d’autres préfèrent se soumettre à un bilan et tout autre examen jugé utile dans les hôpitaux modernes d’ici. »
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