Quand vient l’automne – un film de François Ozon
« Michelle profite de sa retraite dans un paisible village français, près de sa meilleure amie Marie-Claude. Elle attend avec impatience la visite de son petit-fils Lucas, qui passera les vacances scolaires avec elle. Mais la visite ne se passe pas comme prévu et Michelle se retrouve bientôt seule à la maison. Elle se sent seule et sombre dans la dépression. Jusqu’à ce que le fils de Marie-Claude sorte de prison… »
L’intrigue est basée sur un souvenir d’enfance du réalisateur : une tante qui, lors d’un repas de famille, sert une poêlée de champignons qui empoisonne tous les convives…sauf elle qui ne l’a pas goutée.
Derrière cette anecdote qui prête à sourire, se révèle la complexité des êtres humains, ici en les personnages de Michelle et Marie-Claude, respectivement joués par Hélène Vincent et Josiane Balasko. Deux femmes, deux mères, deux vieilles amies liées par un passé commun qui affecte encore leur quotidien. A l’époque du jugement immédiat, de l’opinion tranchée, François Ozon nous donne à voir des êtres à l’identité multiple qui suscitent en nous de l’empathie, de l’inquiétude existentielle -ou comment vivre avec ses fantômes, des questionnements moraux -rendre justice aux morts, est-ce compromettre la vie des vivants ? etc.
Si vous n’avez pas encore la gorge qui vous pique de trop, vous reprendrez bien un peu de champignons ? Il paraît d’ailleurs que c’est LE nouvel allié anti-âge… (ça y est, moi, j’ai des vapeurs…)
Hélène Vincent déclarait déjà dans une interview en 1989 : « les rides chez les femmes sont un problème…pour les cinéastes ! » qui, s’ils sont masculins, bénéficient eux de la croyance qu’ils vieillissent comme le bon vin… En revanche, « L’une des plus grandes tragédies de la vie d’une femme est de vieillir. C’est aussi la tragédie la plus longue, car on s’y prépare à peu près toute la vie. » (Susan Sontag, 1972*)
Dans le cinéma de François Ozon, les femmes échappent à ce double standard du vieillissement -sexisme et âgisme. Mais dans le 7e art français, en général, elles sont soit cantonnées à des rôles caricaturaux (la vieille méchante Tatie Danielle dans le film éponyme ou la follette Poupette dans La Boum) soit carrément invisibilisées.
« À l’image, les femmes ne semblent avoir qu’une alternative : être jeunes ou rester jeunes. Les femmes ne vieillissent pas… elles disparaissent des écrans ! » comme le constate l’AAFA*(Actrices & Acteurs de France Associés). Malgré leur poids réel dans la société française -1 femme majeure sur 2 a plus de 50 ans, sur l’ensemble des films sortis en France en 2023, seuls 9 % des rôles ont été attribués à des comédiennes de plus de 50 ans, soit 2 fois moins de rôles pour des femmes que pour des hommes du même âge (édition 2024 du baromètre AAFA-Tunnel de la comédienne de 50 ans*).
« Qui n’est pas représenté·e n’existe pas. Rendre visibles les femmes de plus de 50 ans dans les fictions est un enjeu de société. »
Je repars à la cueillette (militante) et j’attends votre critique ciné, avec plaisir, sur : Liages@solidaris.be
Elodie, mycologue et cinéphile !
Quand vient l’automne, un film de François Ozon
Avec Hélène Vincent, Josiane Balasko, Ludivine Sagnier, Pierre Lottin
Genre : Drame ; Durée : 102 min ; Sortie : 09.10.2024
*Sources :
Synopsis extrait du site du cinéma Palace
Susan Sontag, 1972 – cité dans Vieille Peau, Fiona. Schmidt, 2023.
AAFA (Actrices & Acteurs de France Associés) combat les stéréotypes sexistes liés à l’âge des femmes présents dans les fictions, questionne le phénomène d’invisibilité, et brise l’omerta.
AAFA-Tunnel de la comédienne de 50 ans est l’une des commissions de l’AAFA : Édition 2024 du baromètre AAFA-Tunnel de la comédienne de 50 ans – AAFA (aafa-asso.info)
Pour aller plus loin :
A écouter : François Ozon dans l’émission La 20e heure d’Eva Bester sur France Inter « François Ozon : “On se réconcilie avec les vivants après leur mort” | France Inter (radiofrance.fr) »