Le clown : un moyen de prendre la parole entre soin, culture et émotions !
Associer le clown à la naïveté de l’enfance est vite établi. En réalité, la démarche du clown est bien plus complexe. Elle permet à l’être humain (enfant comme adulte) d’exprimer des émotions, des positions, des questionnements par le biais d’un imaginaire qui aide à dire ce que l’on pense tout bas ; sur soi, l’institution, le monde. Ne nous voilons pas la face, l’univers des maisons de repos (MR) n’est pas toujours rose et les représentations sociales du mouroir ou du cloitre qui lui sont associées persistent. Le clown serait-il un moyen de remettre un peu de vie dans ces lieux d’habitation et d’ouvrir la porte à d’autres mondes ? Cette discipline théâtrale doit-elle se limiter au champ de l’animation ou démontre-t-elle de plus larges effets, autant thérapeutiques que politiques, en maison de repos ? Après un bref aperçu théorique, nous proposons d’aller à la rencontre de Sébastien Gratoir, clown en maison de repos convaincu des bienfaits de son engagement artistique dans les relations qu’il entretient avec les résidents.
Le clown : entre thérapie et action culturelle
On observe deux orientations dans l’art du clown. La première s’inscrit dans la lignée de l’art thérapie, la seconde dans celle de l’action socioculturelle. Il y a donc des clowns qui s’assument thérapeutes et d’autres qui ne prétendent pas soigner.
Ces premiers interviennent auprès des malades en milieux hospitaliers ou en maison de repos et de soins. La théorie du Clown Relationnel développée par Christian Moffart s’inscrit dans ce courant thérapeutique. « Le Clown Relationnel est une démarche de soins relationnels par la voie du clown pratiquée par des soignants et autres professionnels des services éducatifs et thérapeutiques ». Ces soins relationnels sont complémentaires aux soins techniques. Ils sont majoritairement prestés auprès de personnes présentant des difficultés communicationnelles ; très jeunes enfants à l’hôpital, personnes âgées désorientées, personnes atteintes de maladies mentales… « Ce sont des soins vivifiants qui accueillent et accompagnent les souffrances morales et en particulier les états de détresse des patients ». Pour les personnes atteintes de maladies d’Alzheimer dans un stade avancé, par exemple, le clown va à la rencontre de souvenirs enfuis qui ne peuvent plus s’exprimer par la voie cognitive. D’après Fernand Bruneau, coordonnateur loisir en psychogériatrie au Québec, la voie sensorielle, corporelle et émotionnelle, qu’emprunte le clown, aide incontestablement ces personnes à renouer avec leur existence. Elles se sentent mieux en elles-mêmes mais également plus comprises et peuvent alors se reconnecter, recréer du lien social et affectif.
Notre ASBL est soucieuse de ne pas associer les MR aux hôpitaux. La majorité des personnes qui y résident sont effectivement en bonne santé et refusent d’être considérées comme des malades. Les clowns qui interviennent dans ces lieux n’envisagent donc pas de participer à ce raccourcit trop vite établi entre vieillesse et maladie ou vieillesse et solitude. Plutôt que de s’identifier à un thérapeute, le clown de la maison de repos va justement, par l’humour et l’imagination créative, proposer aux personnes de s’émanciper de ces idées préconçues. Il est en quelque sorte un empêcheur de tourner en rond qui propose de mettre un peu de culture artistique dans l’institution et invite les résidents à se joindre à lui.
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